Méditation du 21 mars 2020

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Pour se préparer à célébrer le dimanche de « Laetare »

Au milieu d’un carême inédit, nous célébrerons demain avec toute l’Eglise le dimanche de « Laetare », le dimanche de la joie :

« Réjouissez-vous [Laetare] avec Jérusalem ! Exultez en elle, vous tous qui l’aimez ! Avec elle, soyez pleins d’allégresse, vous tous qui la pleuriez ! Alors, vous serez nourris de son lait, rassasiés de ses consolations ; alors, vous goûterez avec délices à l’abondance de sa gloire. » (Isaïe 66,10-11)

Comme la couleur liturgique rose de ce dimanche, mélange du blanc de la fête et du violet de la pénitence, cette joie sera teintée de souffrance et de compassion avec tous ceux qui sont durement affligés ces jours-ci : malades touchés par la maladie, personnes éprouvées par le deuil, soignants et autres professionnels qui assurent leur service jusqu’à l’héroïsme, familles qui accompagnent leurs enfants dans des conditions exigeantes, personnes âgées, déprimées ou isolées, foule immense d’êtres humains inquiets pour leur avenir.

Ce sera la joie des Béatitudes, une joie paradoxale que nous pourrons goûter ensemble, pour reprendre souffle dans la pénitence qui nous est imposée.

La joie du salut reçu du Dieu, la joie de la présence de Jésus :

« Vous aussi, maintenant, vous êtes dans la peine, mais je vous reverrai, et votre cœur se réjouira ; et votre joie, personne ne vous l’enlèvera. » (Jean 16,22)

La joie de la fraternité, une fraternité nouvelle que nous tissons patiemment ces jours-ci. La joie de « Qahal », cette communauté que le Seigneur convoque en particulier le dimanche, jour du Seigneur.

La joie de la « communion spirituelle », en ce deuxième dimanche où les fidèles pourront offrir au Seigneur leur faim du pain eucharistique et s’unir silencieusement au Christ.

La joie de l’espérance, à l’invitation de cette religieuse française qui vit à Milan et qui nous partage ces mots tellement beaux :

L’espérance en Italie ces jours-ci, c’est le ciel d’un bleu dépollué et provocant, c’est le soleil qui brille obstinément sur les rues désertes, et qui s’introduit en riant dans ces maisonnées qui apprennent à redevenir familles.

L’espérance ce sont ces post-it anonymes par centaines qui ont commencé à couvrir les devantures fermées des magasins, pour encourager tous ces petits commerçants au futur sombre, à Bergame d’abord, puis, comme une onde d’espérance virale elle aussi en Lombardie, avant de gagner toute l’Italie : « Tout va bien ». Et comment ne pas penser à ces paroles de Jésus à Julienne de Norwich «… mais tout sera bien et tout finira bien » ?

L’espérance c’est la vie qui est plus forte et le printemps qui oublie de porter le deuil et la peur, et avance inexorablement, faisant verdir les arbres et chanter les oiseaux.

L’espérance ce sont tous ces professeurs exemplaires qui doivent en quelques jours s’improviser créateurs et réinventer l’école, et se plient en huit pour affronter avec courage leurs cours à préparer, les leçons online et les corrections à distance, tout en préparant le déjeuner, avec deux ou trois enfants dans les pattes.

L’espérance, tous ces jeunes, qui après les premiers jours d’inconscience et d’insouciance, d’euphorie pour des « vacances » inespérées, retrouvent le sens de la responsabilité, et dont on découvre qu’ils savent être graves et civiques quand il le faut, sans jamais perdre créativité et sens de l’humour : et voilà que chaque soir à 18h, il y aura un flashmob pour tous… un flashmob particulier. Chacun chez soi, depuis sa fenêtre… et la ville entendra résonner l’hymne italien, depuis tous les foyers, puis les autres soirs une chanson populaire, chantée à l’unisson. Parce que les moments graves unissent.

L’espérance, tous ces parents qui redoublent d’ingéniosité et de créativité pour inventer de nouveaux jeux à faire en famille, et ces initiatives de réserver des moments « mobile-free » pour tous, pour que les écrans ne volent pas aux foyers tout ce Kairos qui leur est offert.

L’espérance – après un premier temps d’explosion des instincts les plus primaires de survie (courses frénétiques au supermarché, ruée sur les masques et désinfectants, exode dans la nuit vers le sud… ) – ce sont aussi les étudiants qui, au milieu de tout ça, ont gardé calme, responsabilité et civisme… qui ont eu le courage de rester à Milan, loin de leurs familles, pour protéger leurs régions plus vulnérables, la Calabre, la Sicile… mais surtout qui résistent encore à cet autre instinct primaire de condamner et de montrer du doigt.

Les prêtres de la FMPV — Pères Alexandre, Edouard & Jean

 

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