L’empaquetage de l’Arc de Triomphe

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Jeudi 16 Septembre, Emmanuel Macron inaugurait l’empaquetage de l’Arc de Triomphe. Un voile plissé de couleur argenté bleuté recouvre le célèbre monument de la place de l’Etoile. Cette installation est visible jusqu’au dimanche 03 Octobre.

Une réalisation sujette aux controverses

Cette réalisation posthume de Christo est sujette aux controverses. Certains aiment tandis que d’autres ont des réactions parfois très vives.

En effet, certains y voient la profanation de ce lieu où repose le Soldat inconnu, alors que d’autres s’inquiètent du coût de l’opération et de l’impact sur l’environnement. Au sujet de ces deux derniers arguments, il faut savoir que Christo avait déjà financé ce projet grâce à la vente de ses études préparatoires, dessins, collages du projet, ainsi que des maquettes, œuvres des années cinquante-soixante et des lithographies originales dédiées à d’autres sujets. Quant aux matériaux employés, ils sont recyclables.

Le journal la Croix soulignait, dans un article du 18 septembre, que cette oeuvre posthume serait probablement la dernière de ces deux artistes qui furent d’une réelle élégance éthique et esthétique.

Comment expliquer une telle démarche

Christo Vladimiroff Javacheff naît à Gabrovo en Bulgarie. Il  fuit le communisme en passant par Vienne et arrive à Paris en 1958.

Jeanne-Claude Denat de Guillebon voit le jour le même jour et la même année à Casablanca au Maroc. C’est à Paris que tous deux se rencontreront. Depuis cette rencontre, ils travaillèrent toujours ensemble.

Une oeuvre singulière et inclassable

La pratique de leur art est atypique et originale. L’empaquetage (ils tenaient à ce mot)  évoquait pour eux les voyages et quelque chose du fugace.

Une admiration pour l’Arc de Triomphe

Christo, dès sa majorité intégrera les Beaux-Arts de Sofia. C’est là qu’il se formera à la peinture, la sculpture et l’architecture.

A son arrivée à Paris, de la fenêtre de sa chambre de bonne, il apercevait l ’arc de triomphe et les toits en ardoise de Paris.

Cependant, ce n’est que quelques années plus tard, en le contemplant des fenêtres de leur premier appartement parisien que, fasciné par ses volumes simples, il souhaitera, en l’empaquetant, mettre en évidence ses lignes de force.

La fascination des étoffes

Tous deux confiaient dans un entretien « A toutes les époques de l’histoire de l’art, l’utilisation d’ étoffes et de tissages fascinèrent les artistes. Des époques les plus reculées à nos jours, l’arrangement des tissus – les plis, les plissés, les drapés – joua un rôle important dans la peinture, la fresque, le relief et la sculpture … ».

Christo expliquait donc son projet par ces mots : « l’Arc de Triomphe sera comme un objet vivant qui va s’animer dans le vent et refléter la lumière. Les plis vont bouger… ».

Un appel à la liberté

Leurs réalisations offrirent toujours la possibilité d’une interprétation personnelle. A leurs yeux, une oeuvre ne devait délivrer  qu’un seul message, celui de cette liberté qui nous apprend que toute interprétation d’une oeuvre est légitime. En somme, elle doit favoriser les débats sur l’art.

Dans un entretien, ils confiaient « … Personne ne peut acheter ces oeuvres, personne ne peut les posséder, personne ne peut les commercialiser, personne ne peut vendre des billets pour les voir… Notre travail parle de liberté ».

Une oeuvre temporaire qui est un appel

Devant des critiques et propos parfois très outranciers, cette exposition temporaire nous appelle donc :

– à la réflexion. Effectivement, nous avons le droit de ne pas aimer. Néanmoins nous devons respecter ce travail car, pour le mener à bien, il fallait avoir : des connaissances en géométrie – en architecture – en gestion de la lumière et des couleur, bref de réelles qualités artistiques.

– à la tolérance : à ceux qui objectent que c’est laid, nous pouvons répondre que la laideur est subjective. Nous pouvons également répondre à ceux qui affirment que l’Arc de triomphe est dénaturé, que si Christo désirait emballer ces lieux historiques c’est parce que, trop souvent par habitude, nous ne les regardons même plus.

– à avoir un regard nouveau : Par l’emballage, il désirait donc les remettre en valeur afin que nous les re-découvrions avec un œil nouveau. Néanmoins la structure et les sculptures de ces monuments restèrent toujours intactes. Le 3 octobre, l’Arc de Triomphe sera à nouveau tel qu’il était.

Rappelons-nous que temporaire signifie court, momentané … Il faut donc y voir une invitation à avoir un regard toujours neuf sur tout ce qui nous entoure, que ce soit notre environnement où sur tout ce que nous rencontrons.

Pour conclure 

Certes, l’art contemporain peut être déroutant et nous mettre mal à l’aise. Néanmoins, comme le soulignait le pape Jean II, l’art est aussi une ouverture « sur la profondeur, sur la hauteur, sur l’inexprimable de l’existence ».

Il affirmait aussi que l’Église « a besoin des arts, et ceci non pas en premier lieu pour commander des œuvres artistiques et les prendre ainsi à son service, mais pour arriver à une expérience plus vaste et plus profonde de la condition humaine, des moments glorieux et misérables de l’homme ».

Puis, il ajoutait « elle en a besoin pour mieux savoir ce qu’il y a au plus profond de l’homme; de cet homme à qui elle doit prêcher l’Evangile ». (Jean-Paul II  – Au monde de la culture – 16 Juin 1985 – Aux représentants du monde de la science et de l’art le 12-09-1983)

Dans ses réflexions sur l’art, le théologien Karl Rahner invitait à ne pas juger trop rapidement des œuvres artistiques qui pourraient sembler contredire implicitement ou explicitement la doctrine chrétienne.

Il sollicitait plutôt un discernement et se demandait s’il n’y avait pas bien souvent en elles, un véritable amour de la réalité et d’authentiques questionnements que les chrétiens n’auraient peut-être pas encore suffisamment éprouvés et pris en charge. (Les écrits théologiques sur l’art chez Karl Rahner (1954-1983).

 Georgette

     

 Source http://www.moreeuw.com/histoire-art/christo.htm  – Franceculture.fr/architecture/arc-de-thriomphe-empaquete… – Cultea (Rendre accessibles la culture et l’art). – Doit-on avoir peur de l’art contemporain, Liturgie et Sacrements, Conférence des évêques de France

Illustration : Photos personnelles Pascal G.

 

 

 

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