Homélie du père Alexandre – 4eme dimanche du temps ordinaire – Année C

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L’Église est malade

Certains de ses membres et de ses responsables l’ont durement défigurée.

Excès de pouvoir, manipulations financières, emprises psychologiques en tous genres et abus sexuels, autant de fléaux, souvent liés les uns aux autres, qui laissent des blessures béantes dans la vie de ceux et celles qui ont été abusés et de profondes cicatrices dans le corps de l’Église ainsi maltraité.

L’ Église est malade comme le dit le Seigneur à St François, dans la chapelle en ruine de San Damiano, lorsqu’il parle d’Elle.

Que faire ?

Est-ce que nous allons fermer les yeux et continuer notre chemin comme si de rien n’était ? Est-ce que nous allons nous aussi la défigurer en la critiquant, en la maltraitant, en rejoignant la meute de ceux qui l’attaquent et la dénigrent ?

Allons-nous la défendre inconditionnellement et maladroitement, sans regarder en elle ce qui est à changer ?

Où bien est-ce que nous allons la soigner, l’aimer et lui permettre de rayonner pleinement la Lumière du Christ qui l’habite, à la manière du Bon Samaritain qui prit soin de l’homme à demi-mort sur le bord de la route ?

En 1994, quand j’étais séminariste à Rome, je fus choisi pour servir la messe du pape Jean-Paul II au cours de laquelle il créait de nouveaux cardinaux. Parmi eux, il y avait l’archevêque de Tananarive, Mgr Armand Gaëtan Razafindratandra.

Après la messe, à un journaliste qui lui posait des questions, ce nouveau cardinal présenta sa mission à Madagascar, ses joies et ses difficultés. Parmi elles, il regardait en face les cas de corruption ou d’abus dans son diocèse.

Je me souviens aussi de cette phrase qu’il partagea avec lui : « Ce n’est pas parce que ma mère est vieille, malade, sourde, que je vais l’abandonner. Non,  je l’aime et je vais au contraire la soigner. L’ Église est ma vieille mère qui m’a introduit dans la vie de Dieu, qui fait jaillir Sa vie en moi. Ce n’est pas parce qu’elle est malade, blessée par certains de ses membres, que je vais l’abandonner. Non, je l’aime et je vais la soigner et en prendre soin ».

Aimer l’Église

Ce n’est pas un troisième commandement qui viendrait s’ajouter à l’amour de Dieu et à l’amour des frères.  J’aime l’Église parce que j’aime le Christ ainsi que les frères et les sœurs qu’il me donne.

Dans le Credo, sa place est importante : l’Église est citée comme la première-née de l’Esprit. Elle est elle-même objet de foi.

Nous sommes dans un autre ordre que celui de la sympathie ou de l’allergie. J’aime l’Église parce que le Christ l’aime. « Il l’a aimée et s’est livrée pour elle », dit saint Paul dans l’épître aux Éphésiens, en faisant allusion au mariage.

Aussi, je vous propose aujourd’hui trois manières de l’aimer. Ce sont celles que nous offrent les lectures de ce jour et que nous propose aussi notre saint père le pape François.

Première manière de l’ aimer : prier pour elle

Jésus lui-même, tout au long de sa vie terrestre, n’eut de cesse de prier pour l’ Église. Avant de choisir les 12 apôtres et les 72 disciples, il passa sa nuit à prier le Seigneur sur la montagne.

Il le fit aussi quand, dans la barque, les apôtres étaient ballotés par les flots. Il prie également pour eux sur la montagne.

Et, avant de rejoindre son Père, Jésus nous permet d’entrer dans sa prière quotidienne pour son  Église et pour tous ceux qui la composent : « Qu’ils soient Un comme nous sommes Un ! » « Rends les saints grâce à ta Parole de Vérité ! » (Jean 17, 17. 22).

Alors, est-ce qu’à la suite de Jésus, nous prions pour Elle ?

Est-ce qu’en plus de la prière du Notre Père que nous apprit le Seigneur, nous prions avec celle de Jésus au chapitre 17 de Jean ? Je connais un prêtre qui l’a dit chaque jeudi…

Deuxième manière d’aimer l’Église : prendre la parole

La prendre, non pour détruire mais pour construire. Non pour dénigrer mais pour ouvrir des chemins de vie, à la manière du prophète que nous sommes tous par notre baptême, à l’image de Jérémie : « Je fais de toi un prophète pour les nations, ne tremble pas ».

C’est exactement ce que nous propose le pape François. En nous invitant à participer au synode, il pose à chacun d’entre nous ces questions et il nous enjoint de prendre la parole : « Qu’est-ce qui est à améliorer dans l’Église que nous formons ? Quelles propositions pouvons-nous faire pour notre paroisse, notre aumônerie, notre mouvement, notre diocèse et pour l’Église universelle ? Ou bien encore comment faire grandir la communion entre nous ? Comment développer la participation de tous à la vie de l’ Église ? Comment vivre pleinement la mission ? »

Nous avons chacun quelque chose à dire, à apporter, à partager.

Alors, donnons notre avis, soit en l’envoyant par écrit au secrétariat ou bien en formant de petites équipes ou encore en rejoignant celles qui existent déjà. Elles sont indiquées dans la feuille d’information.

Vous allez me dire : « Est-ce que notre parole va être entendue ? Est-ce qu’elle ne sera pas perdue dans l’ensemble des réflexions qui remonteront jusqu’au pape à Rome ? »

Si Jésus avait eu la même réflexion que vous, il n’aurait jamais parlé comme il l’a fait dans la synagogue où il connaissait les à priori de ses frères : est-ce que ma parole va être reçue ? Ils savent tous qui je suis, le fils de Joseph !

Alors, pour l’Église universelle mais aussi pour notre paroisse, parlez, écoutez, dialoguez. Votre avis m’intéresse aussi comme curé de ce groupement. Il me permettra de voir ce que nous avons à faire évoluer localement.

Troisième manière de l’aimer, devenir des saints

« Au cœur de l’ Église, je serai l’amour », c’est ce à quoi,  à la suite de l’hymne à la Charité que nous avons entendu aujourd’hui, nous invite la petite Thérèse.

Comme le disait Bernanos : « L’Église, elle n’a pas besoin de réformateurs, elle a besoin de saints ». Alors, commençons par réformer notre vie, par nous convertir toujours davantage au Christ, à laisser son Amour inspirer tous nos actes, nos paroles et notre vie.

Ce sont les saints, comme saint Benoît, saint François, saint Dominique, saint Ignace, sainte Thérèse d’Avila, saint Vincent de Paul, et tant d’autres, qui sortirent l’Église des impasses dans lesquelles certains de ses membres l’avaient fourvoyée.

Aujourd’hui, aimons là ! En priant pour elle, en devenant des saints et en prenant la parole.

Amen.

Père Alexandre +

Illustration : Pxhere – CCO Domaine Public

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