Avez-vous remarqué que Simon change de prénom au cours de ce récit ?
Au début, il s’appelle Simon, « Jésus monte dans une barque appartenant à Simon », « il dit à Simon », « Simon lui répondit ».
Mais, à un moment bien précis de l’évangile, il s’appelle Simon-Pierre : « Simon-Pierre tomba aux genoux de Jésus ».
Qu’est-ce qui a provoqué ce changement de prénom ?
Est-ce que c’est Jésus qui lui dit « désormais tu t’appelleras Simon-Pierre » ? Non.
Ou bien est-ce que ce sont les autres qui ont décidé de lui donner ce nouveau prénom ? Non. Est-ce lui alors ? Non plus.
Alors qu’a-t-il fait pour recevoir ce nouveau prénom ?
Il reçoit ce nouveau prénom après avoir écouté et mis en pratique la parole de Jésus : « sur ta parole, je vais jeter les filets ».
Et quand il revient les filets pleins de poissons, il ne s’appelle plus Simon, mais Simon-Pierre : Simon-Pierre se jette alors aux pieds de Jésus.
En d’autres termes, Simon devient Pierre :
Car, il devient un roc et solide comme un rocher, quand il met sa confiance dans la Parole de Jésus, en osant encore pêcher alors qu’il a peiné toute la nuit sans prendre le moindre poisson et que vraiment tout en lui dit que cela ne sert à rien.
Après toute une nuit de pêche dans le froid, la sueur, l’angoisse, il aurait très bien pu dire à Jésus, un charpentier :
« Tu es gentil Jésus, fais ton métier de ton charpentier, nous le nôtre. Nous avons déjà jeté les filets des centaines de fois toute la nuit sans succès. Nous avons déjà tout essayé ! Et cela ne fonctionne pas. Donc si tu veux bien, on va maintenant se reposer, on n’en peut plus ».
Mais non, Simon écoute cette parole qui lui murmure de recommencer, qui ne lui donne pas de recette miracle qui fonctionne à tous les coups, mais qui lui demande de reprendre encore et encore le même geste accompli toute la nuit et chaque jour de sa vie. Simon-Pierre ne désespère pas, il ne se résigne pas, il ose sortir de sa routine, de sa lassitude, de sa déception.
Dans notre vie, nous aussi, nous pouvons connaître des moments où nous sommes découragés.
Rien ne va plus dans notre vie : trop de difficultés, trop d’échecs, trop de blocages. Rien ne bouge. Pourtant, nous avons essayé tant et tant de choses, nous avons suivi tous les conseils qu’on nous a donné. Mais rien ne se déloque. Et nous avons envie de baisser les bras, d’abandonner.
Jésus nous dit alors comme à Simon
« Avance au large, jette les filets ». Il nous dit donc d’oser avancer, de refaire encore les mêmes gestes, de croire à nos idéaux politiques, de les partager avec les autres, de dialoguer, de construire encore et encore une vie où chaque personne est respectée.
Mais aussi de reposer les mêmes gestes d’amour, de tendresse, de pardon, de croire que toute relation humaine se soigne, peut grandir et porter du fruit.
Il nous dit de vivre à nouveau nos gestes de soutien, de consolation, de croire que toute cette bienveillance semée n’est pas vaine, mais fait son travail dans la vie de ceux que nous aidons.
Avancer en eau profonde
Alors oui « sur ta parole Seigneur » :
- J’irai comme Pierre vers des eaux plus profondes chercher au plus profond de moi mon désir et mes attentes les plus fortes.
- Je me découvrirai une audace, un élan, une faim que je fais souvent taire par peur qu’elle soit frustrée.
- Je me relèverai, comme invité par un sourire.
- Je laisserai ma peur sur la rive, je la regarderai enfin pour ce qu’elle est : un habit étriqué que rien ne m’oblige à porter.
- Mes filets déborderont de tes dons, je rirai dans le doute d’être suffisamment large pour tous les accueillir.
- Je ne resterai plus enfermée dans mes propres sentiers, j’irai toujours ailleurs.
- Je saurai que la vie est une marche dont tu nous montres chaque jour un nouveau pas.
Amen.
Père Alexandre +
Illustration : Wikimédia Commons – La pêche miraculeuse de James Tissot (1836-1902) – Oeuvre entrant dans le domaine public