La bible nous relate la longue pédagogie que déployèrent les prophètes afin de faire découvrir au peuple hébreu le véritable sens des sacrifices offerts à Dieu.
Le psaume du 2eme dimanche du temps ordinaire, que nous vous invitons à écouter, en est l’ aboutissement.
Certes, au moment de sa rédaction, les psaumes étaient encore chantés au moment même où, dans le temple, on offrait des sacrifices (ce rite sacrificiel d’ animaux eut lieu jusqu’ à la destruction du temple de Jérusalem en 70 après J.C).
Toutefois lorsque le psalmiste chantait ce psaume, il voulait dire à Dieu : « Je sais que ce qui compte le plus à tes yeux, ce n’ est pas le sacrifice en lui-même, c’ est l’ attitude du cœur qu’ il représente ».
Israël inventa-t-il la coutume sacrificielle ?
Ce n’ est pas Israël qui inventa la coutume des sacrifices. Ils avaient lieu chez les autres peuples du Moyen Orient bien avant que le peuple hébreu fut réellement un peuple.
En effet, cette coutume se développa avec la prise de conscience des hommes d’ un créateur au dessus de tout, à qui l’ Homme devait tout.
Pourquoi un rite d’offrande ?
« Sacrifier » (« sacrum facere » en latin) signifie « faire du sacré » et le mot hébraïque pour dire « offrir un sacrifice » signifie « s’ approcher ».
Il s’ agit donc, par une offrande, d’ être au plus près de Dieu, d’ entrer en communion avec Lui.
Par conséquent, avec la découverte progressive de la vraie nature de Dieu, les pratiques sacrificielles changèrent.
La spécificité du rite sacrificiel en Israël
Certes, il y avait une très grande variété de sacrifices et ils ressemblaient à ceux pratiqués par leurs voisins.
Toutefois, en Israël, les sacrifices humains furent interdits. C’ est d’ailleurs ce que nous apprennent quelques passages de l’ Ancien Testament. Par exemple, nous pouvons relire ce que Jérémie dit au peuple élu de la part de Dieu :
« Les fils de Juda ont fait ce qui est mal à mes yeux…Ils ont édifié les lieux sacrés pour consumer par le feu leurs fils et leurs filles ; cela, je ne l’ avais pas ordonné, cela n’ était pas venu à mon esprit ! » (Jr 7, 30, 31).
La découverte d’Abraham
Abraham apprit que « sacrifier » (« faire sacré ») ne veut pas dire « tuer » !
Dans l’ épisode biblique appelé « la ligature d’Isaac », Abraham est prêt à offrir à Dieu son fils en sacrifice.
Mais, grâce à l’intervention de l’ Ange du Seigneur, il ne le tue pas car celui-ci lui dit :
« Ne porte pas la main sur le garçon ! Ne lui fais aucun mal ! Je sais maintenant que tu crains Dieu : tu ne m’ as pas refusé ton fils, ton unique » (Gn 22, 12).
Ce récit permet à Abraham et nous fait comprendre à nous aussi :
- d’ une part ce qu’ est la « crainte » de Dieu
- et d’autre part ce que Dieu désire réellement.
Qu’ est-ce que la crainte de Dieu ?
Celle-ci n’ est pas la peur mais la soumission à Dieu.
Or se soumettre est un terme militaire qui signifie : servir avec dévouement dans l’obéissance et le respect des commandements.
La soumission à Dieu n’ est donc rien d’autre que d’ avoir le désir de Le servir avec amour, dévouement, fidélité et intégrité de cœur.
Et c’ est ce qu’Abraham désire et fait. C’ est pourquoi, Dieu par la voix de l’ Ange lui fait cette promesse :
« Puisque tu as écouté ma voix, toutes les nations de la terre s’ adresseront l’ une à l’ autre la bénédiction par le nom de ta descendance » (Gn 22, 18).
En conséquence, ce récit nous apprend que, depuis le début de l’ Alliance entre Dieu et le peuple qu’ Il se choisit, les sacrifices humains sont strictement interdits. Il suffit simplement d’ être à Son écoute.
La logique de l’ amour de Dieu
Dieu est le Dieu de la vie. Il est donc impossible que pour se rapprocher de Lui, pour Lui être agréable, il faille donner la mort !
Certes, les sacrifices d’animaux continueront encore. Cependant, peu à peu le sens du « sacrifice » évoluera sur deux points essentiels.
Sur le sens donné au sacrifice
Le Dieu de l’ Alliance n’ est pas un Dieu courroucé qu’ il faut apaiser. Il n’ exige pas des mises à mort car il s’ agirait alors de rites magiques destinés à L‘ acheter !
Or le Dieu d’ Israël est un Dieu dont le dessein n’ est que bienveillant. Il est le Dieu de l’ Amour et de la Vie.
C’ est pourquoi les sacrifices ne peuvent être que des gestes d’ amour et de reconnaissance.
Et c’ est là le but de toute la pédagogie biblique : il faut quitter la logique du « donnant-donnant », des mérites. Il faut entrer dans la logique du don gratuit, de la grâce.
Sur la matière des sacrifices
Les prophètes firent découvrir au peuple élu le véritable sens du sacrifice attendu par Dieu.
En réalité, « faire du sacré », ne consiste pas à tuer mais à faire vivre.
Déjà dans l’ Ancien Testament les textes d’ Isaïe, d’ Osée, le Psaume 50 … mettaient l’ accent sur le sacrifice du cœur.
C’ est ce que résume cette prédication d’ Osée : « Je veux la fidélité, non le sacrifice, la connaissance de Dieu plus que les holocaustes ».
L’ ultime étape de la pédagogie des prophètes
Cette étape se résume par la présentation de l’ idéal du sacrifice que nous présente les quatre « Chants du Serviteur » (passages du livres d’Isaïe lus au cours de la Semaine sainte) et dont nous pouvons méditer cet extrait :
« J’ ai fait reposer sur lui mon esprit ; aux nations, il proclamera le droit. Il ne criera pas, il ne haussera pas le ton, il ne fera pas entendre sa voix au-dehors.
Il ne brisera pas le roseau qui fléchit, il n’ éteindra pas la mèche qui faiblit, il proclamera le droit en vérité » (Is 42, 1, 3).
Ces passages bibliques nous apprennent donc bien que l’ idéal du sacrifice c’ est « une vie donnée pour faire vivre ».
Pour conclure :
Le psaume 39 (40) résume bien le long apprentissage du peuple élu pour entamer avec Dieu le dialogue de l’ amour.
Dans l’ Alliance du Sinaï, les sacrifices d’ animaux symbolisaient la volonté du peuple de communiquer avec Dieu, de Lui montrer attachement et appartenance par des sacrifices rituels.
Avec la Nouvelle Alliance, le dialogue est réalisé. Dorénavant, les offrandes et sacrifices ne peuvent être que « spirituels ».
C’ est d’ ailleurs ce à quoi nous invite ce verset du psaume :
[« Tu ne voulais ni offrande ni sacrifice, tu as ouvert mes oreilles ; tu ne demandais ni holocauste ni victime, alors j’ai dit : « Voici, je viens ».]
Puisque Jésus nous donne ces deux commandements qui résument tous les autres :
« Aime ton Dieu de tout ton cœur et de tout ton esprit et aime ton prochain comme toi-même »
Nous pouvons en déduire que le sacrifice qui plait à Dieu c’ est un esprit qui pense d’ abord aux autres, qui écoute l’ autre …
C’ est aussi celui qui prie pour les autres, qui demande la bénédiction de Dieu pour tous ceux qui en ont besoin, qui implore Sa miséricorde pour tous les pêcheurs. Et nous le sommes tous.
Georgette
Sources : Marie-Noëlle Thabut – Textes du deuxième dimanche du temps ordinaire
Illustrations : Pixabay License – Pas d’ attribution requise